Lettre autographe signée « Marcel Proust », (Paris), (juin 1909), à Étienne Grosclaude, 6 pages in-8, en-tête manuscrite « 102 bd Haussmann ». Longue lettre de Marcel Proust félicitant Étienne Grosclaude pour son article « Van le Terrible » paru dans Le Figaro du 25 juin 1909. « Ces traits dombre constituent ce que jappellerai le clair obscur dans le calembour et donnent à un tel article les ombres profondes, les abîmes redoutables à notre incertaine érudition, qui lui donnent la poésie de certains paysages de Gustave Moreau où dort toujours dans lombre un dieu caché ». Par ces temps où toute amitié, même celle du vieux serviteur pour lenfant de ses maîtres, risque de tourner à la plus criminelle exaltation et de rappeler aux esprits cultivés Oreste et pis! (lads), je ne voulais pas, aujourdhui sous prétexte de littérature comme hier sous celui des finances, commencer avec vous une correspondance suivie. Mais jai tenu à vous dire mon admiration pour cet article où avec un art dune distinction hautaine dont les exemples se trouvent hélas aujourdhui beaucoup moins chez les littérateurs français que dans lhorticulture japonaise. Vous sacrifiez deux mille calembours que vous apercevez et que vous dédaignez, jusquà ce que vous ayez flairé celui quune loi mystérieuse mais indiscutable entoure dune formidable drôlerie et dune poétique beauté. En cela, il restera le titre de vos calembours. Mais cette aristocratique particularité dans le choix de certains calembours ne vous suffit pas. Après cela vous effacez ce qui lui donnerait lévidence dun calembour. Titan lad au lieu dEncelade, de sorte que ces traits dombre constituent ce que jappellerai le clair obscur dans le calembour et donnent à un tel article les ombres profondes, les abîmes redoutables à notre incertaine érudition, qui lui donnent la poésie de certains paysages de Gustave Moreau où dort toujours dans lombre un dieu caché. « Dans lombre habite un dieu caché » Nous avons peur de marcher sur un calembour que vous navez pas reconnu et nous sentons que nous marchons dans une « forêt de symboles qui mobservent avec des regards familiers ». On finit par craindre chaque mot. « Crains dans le mur aveugle un regard qui tépie, en la matière même un verbe est attaché » vers de Gérard de Nerval. Voici Boileau : « à laccent familier jai reconnu le spectre » mais pour remonter aussitôt aux troubles qui ensanglantèrent la minorité de Louis XVI. Toutefois il faut reconnaître que la mythologie nous inspire spécialement et que la fadeur de « laile des vans » a quelque chose dirrésistible. Tant il est vrai que tout nous vient de la Grèce pour donner à ce pays un nom qui ne nous fera pas suspecter de basse flagornerie démagogique, ce quon nhésiterait pas à faire si nous lui donnions à la place cet autre nom cher à Leconte de Lisle qui lui reconnait formellement le titre de Lad. Je vous quitte car si vrai quil puisse être que les plus mauvais calembours sont encore un hommage que la médiocrité rend à lesprit, je ne veux pas vous raser. Votre reconnaissant et dévoué. Venu à Paris en sabotant est admirable ». Dans son article paru en première page du Figaro , Étienne Grosclaude relate avec un humour incisif les mésaventures survenues aux chevaux de courses qui devaient rallier lhippodrome dAuteuil pour le championnat annuel de Steeple-chase. Ces derniers, convoyés vers lhippodrome par des « vans » furent arrêtés par des syndicalistes en présence du député Maurice Berceaux et dÉmile Pataud C. Et Abel Craissac (Inspecteur du travail). Grosclaude, tout en finesse et calembour ridiculise la manifestation des contestataires en concluant notamment : « Peut-être que dans bien des siècles, alors que loeuvre politique de M. Berteaux aura disparu tout entière, une légende mythologique confondra-t-elle vaguement le héros de Maisons-Lafitte avec un autre Titan, fils de Titan, lad, enseveli sous lEtna par la colère des dieux ». Jules Lemaître se disait fasciné par son « irrévérence universelle », ses « inventions de fou dialecticien» et l’apparence d’«élégance imbécile» de ses textes. À cette date, Marcel Proust a entrepris depuis un an la rédaction d. À la recherche du temps perdu. Ayant terminé son essai. Le Mercure de France. Refusera de publier en août 1909, il commence alors à structurer et à rédiger ce qui deviendra. Du côté de chez Swann. Qui paraîtra en 1913 à compte dauteur chez Grasset. L’item « MARCEL PROUST / LETTRE AUTOGRAPHE SIGNÉE (JUIN 1909) / ART DU CALEMBOUR / » est en vente depuis le mardi 23 mai 2017. Il est dans la catégorie « Livres, BD, revues\Livres anciens, de collection ». Le vendeur est « autographes-historiques » et est localisé à/en Paris, Ile-de-France. Cet article peut être livré partout dans le monde.
Marcel Proust / Lettre Autographe Signée (juin 1909) / Art Du Calembour /
Lettre autographe signée « Marcel Proust », (Paris), (juin 1909), à Étienne Grosclaude, 6 pages in-8, en-tête manuscrite « 102 bd Haussmann ». Longue lettre de Marcel Proust félicitant Étienne Grosclaude pour son article « Van le Terrible » paru dans Le Figaro du 25 juin 1909. « Ces traits dombre constituent ce que jappellerai le clair obscur dans le calembour et donnent à un tel article les ombres profondes, les abîmes redoutables à notre incertaine érudition, qui lui donnent la poésie de certains paysages de Gustave Moreau où dort toujours dans lombre un dieu caché ». Par ces temps où toute amitié, même celle du vieux serviteur pour lenfant de ses maîtres, risque de tourner à la plus criminelle exaltation et de rappeler aux esprits cultivés Oreste et pis! (lads), je ne voulais pas, aujourdhui sous prétexte de littérature comme hier sous celui des finances, commencer avec vous une correspondance suivie. Mais jai tenu à vous dire mon admiration pour cet article où avec un art dune distinction hautaine dont les exemples se trouvent hélas aujourdhui beaucoup moins chez les littérateurs français que dans lhorticulture japonaise. Vous sacrifiez deux mille calembours que vous apercevez et que vous dédaignez, jusquà ce que vous ayez flairé celui quune loi mystérieuse mais indiscutable entoure dune formidable drôlerie et dune poétique beauté. En cela, il restera le titre de vos calembours. Mais cette aristocratique particularité dans le choix de certains calembours ne vous suffit pas. Après cela vous effacez ce qui lui donnerait lévidence dun calembour. Titan lad au lieu dEncelade, de sorte que ces traits dombre constituent ce que jappellerai le clair obscur dans le calembour et donnent à un tel article les ombres profondes, les abîmes redoutables à notre incertaine érudition, qui lui donnent la poésie de certains paysages de Gustave Moreau où dort toujours dans lombre un dieu caché. « Dans lombre habite un dieu caché » Nous avons peur de marcher sur un calembour que vous navez pas reconnu et nous sentons que nous marchons dans une « forêt de symboles qui mobservent avec des regards familiers ». On finit par craindre chaque mot. « Crains dans le mur aveugle un regard qui tépie, en la matière même un verbe est attaché » vers de Gérard de Nerval. Voici Boileau : « à laccent familier jai reconnu le spectre » mais pour remonter aussitôt aux troubles qui ensanglantèrent la minorité de Louis XVI. Toutefois il faut reconnaître que la mythologie nous inspire spécialement et que la fadeur de « laile des vans » a quelque chose dirrésistible. Tant il est vrai que tout nous vient de la Grèce pour donner à ce pays un nom qui ne nous fera pas suspecter de basse flagornerie démagogique, ce quon nhésiterait pas à faire si nous lui donnions à la place cet autre nom cher à Leconte de Lisle qui lui reconnait formellement le titre de Lad. Je vous quitte car si vrai quil puisse être que les plus mauvais calembours sont encore un hommage que la médiocrité rend à lesprit, je ne veux pas vous raser. Votre reconnaissant et dévoué. Venu à Paris en sabotant est admirable ». Dans son article paru en première page du Figaro , Étienne Grosclaude relate avec un humour incisif les mésaventures survenues aux chevaux de courses qui devaient rallier lhippodrome dAuteuil pour le championnat annuel de Steeple-chase. Ces derniers, convoyés vers lhippodrome par des « vans » furent arrêtés par des syndicalistes en présence du député Maurice Berceaux et dÉmile Pataud C. Et Abel Craissac (Inspecteur du travail). Grosclaude, tout en finesse et calembour ridiculise la manifestation des contestataires en concluant notamment : « Peut-être que dans bien des siècles, alors que loeuvre politique de M. Berteaux aura disparu tout entière, une légende mythologique confondra-t-elle vaguement le héros de Maisons-Lafitte avec un autre Titan, fils de Titan, lad, enseveli sous lEtna par la colère des dieux ». Jules Lemaître se disait fasciné par son « irrévérence universelle », ses « inventions de fou dialecticien» et l’apparence d’«élégance imbécile» de ses textes. À cette date, Marcel Proust a entrepris depuis un an la rédaction d. À la recherche du temps perdu. Ayant terminé son essai. Le Mercure de France. Refusera de publier en août 1909, il commence alors à structurer et à rédiger ce qui deviendra. Du côté de chez Swann. Qui paraîtra en 1913 à compte dauteur chez Grasset. L’item « MARCEL PROUST / LETTRE AUTOGRAPHE SIGNÉE (JUIN 1909) / ART DU CALEMBOUR / » est en vente depuis le mardi 23 mai 2017. Il est dans la catégorie « Livres, BD, revues\Livres anciens, de collection ». Le vendeur est « autographes-historiques » et est localisé à/en Paris, Ile-de-France. Cet article peut être livré partout dans le monde.